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Manuela Cortés García: Pasado y presente de la Música Andalusí

Reseña de Fethi Salah

Sevilla: Ed. Fundación El Monte, 1996. 165 pp,
bibliographie, illustrations.


Cet article n'est pas un résumé de l'ouvrage en question; je le considère comme une sorte d'Errata ou d'Addenda dans laquelle je sélectionne et souligne certaines données qui me semblent importantes quant au thème proposé: la musique d'Al-Andalus et ses prolongements au Maghreb.

Après une introduction historique à la musique d'Al-Andalus 1, Manuela Cortés García, auteur de plusieurs articles et d'une thèse 2, brosse, dans le présent ouvrage, un tableau général des répertoires musico-poétiques maghrébins d'origine andalouse, soulignant notamment celui du Maroc.

L'ouvrage est intéressant dans la mesure où d'une part il représente un des récents produits d'un certain regain d'intérêt en Espagne 3 quant aux musiques du Maghreb d'origine andalouse, et d'autre part il représente la vision 4 (et donc une certaine interprétation) d'un observateur qui n'appartient pas à la culture étudiée mais dont la connaissance de la langue arabe et l'expérience de terrain (notamment au Maroc) sont pertinentes. Les données concernant le répertoire algérien semblent provenir, cependant, d'une vision relativement uniformisante de celui-ci; elles ne reflètent pas, par conséquent, fidèlement la réalité complexe et diversifiée du répertoire algérien.

Structuré en onze chapitres, qui sont précédés d'un prologue et suivis d'un épilogue, l'ouvrage contient une bibliographie relativement complète et quelques illustrations iconographiques.

Manuela Cortés García constate la pauvreté des sources et des documents historiques mais souligne l'importance des quelques manuscrits qui nous sont parvenus, notamment les uryûzas ou poèmes didactiques et surtout les textes maghrébins apparus au XVII siècle; siècle à partir duquel a commencé une collecte (au Maroc notamment) de tout ce qui a été transmit oralement. La lecture et l'analyse de cet héritage met en évidence, peu à peu, la splendeur de la musique d'Al-Andalus et permet de combler, progressivement, quelques unes des innombrables lacunes quant à la connaissance de celle-ci.

La transmission orale et la pauvreté des sources manuscrites rendent difficile l'étude approfondie de la musique andalouse. Néanmois, tout porte à croire qu'il existait certaines différences stylistiques dans différentes régions d'Al-Andalus et qui se sont propagées à travers le Maghreb. Cependant, il semble que certaines différences se sont amenuisées avec le temps, et qu'une certaine uniformisation soit apparue.

Les traces de la musique d'Al-Andalus, nous les trouvons dans les quatre écoles représentées par:

  1. l'école marocaine dite musique andalou-maghrébine;
  2. l'école algérienne dite musique garnati 5 (de Grenade);
  3. les écoles tunisienne et lybienne dite maluf 6, écoles possédant certaines connotations orientales dues vraisemblablement à la proximité géographique de l'Orient et à la domination ottomane.

À propos du système modal marocain, l'auteur relève une différence dans la structure de Shadjarat at-tubû' 7 dans les sources d'avant 8 et d'après 9 les XIIIème-XIVème siècles. Je constate, cependant, une donnée apparemment contradictoire à propos de la dérivation d'un mode: le mode al-Mazmûm peut-il être à la fois principal et dérivé 10 ?

Concernant la structure de la nawba de l'école algérienne, l'auteur donne quelques informations parfois imprécises parfois confuses.

  1. Parler de nawba algérienne 11 c'est uniformiser en quelque sorte les trois grandes écoles stylistiques connues en Algérie: Tlemcen (Ouest), Alger (Centre) et Constantine (Est). Bien que certains éléments sont communs au trois écoles 12 , il existe 13 en fait trois nawba-s algériennes, chacune ayant sa structure et ses caractéristiques propres; on parlera donc plus précisément de nawba tlemcénienne, nawba algéroise et nawba constantinoise.
  2. La dâira et la tûshiyya al-insirâf ne sont plus en vigueur dans les nawba-s actuelles.
  3. La mashaliyya appartient particulièrement à la nawba tlemcenienne.
  4. Dans la nawba constantinoise la tûshiyya est remplacée par le bashraf.
  5. "El masaddâr sigue a una introducción instrumental 14 corta. Se trata de un movimiento alegre denominado kursî que por su carácter vocal 15 está considerado como la parte principal de la nawba "16. Ici il semble y avoir une confusion entre le masaddâr et son kursî . En réalité, celui-ci est une introduction exclusivement instrumentale; le kursî n'a, par conséquent, pas de caractère vocal.
  6. Le dary possède une mesure 5/8 dans la nawba constantinoise seulement. Il est à préciser que dans celle-ci, le dary (contrairement aux nawba-s tlemcénienne et algéroise) précède le btayhî .
  7. L'insirâf , dans la nawba algéroise, possède un rythme intermédiaire entre le binaire et le ternaire; aussi lui attribue-t-on souvent la mesure 5/8.
  8. Le jalâs est non pas "la última pieza del insirâf " mais la dernière pièce vocale de la nawba.
  9. Bien que l'auteur mentionne, à plusieurs reprises, le mawwâl 17 dans la nawba marocaine, elle ne mentionne nullement son équivalent dans les nawba-s algériennes: l'istikhbar . Celui-ci est une improvisation instrumentale et vocale sur un distique extrait généralement d'une qacida 18 .

Ces quelques remarques relatives à la structure des nawba-s algériennes ne donnent qu'une idée simpliste de la réalité complexe et diversifiée du répertoire actuel.

Je conclus cet article par une petite note concernant la bibliographie de l'ouvrage. Manuela Cortés García cite deux références bibliographiques relatives aux deux auteurs suivants: YÂLÛL, Y y HAFNÂWÎ -AL 19 . Il s'agit, en fait, d'une seule et même référence qui est la suivante:

YALLAS Jallûl & AL-HAFNÂWÎ Amuqrân. Al-Muwashshahât
wa-al-Azdjâl; Alger: al-Sharika al-Wataniyya lil-Nashr wa-al-
Tawzî'; 3 vol.: 1972 (vol.I), 1975 (vol.II), 1982 (vol.III).
 
 
Notes
1 Chapitre I."Introducción Histórica a la Música de Al-Andalus" (pp.13-23).
 
2 CORTÉS GARCÍA Manuela, Kunnâsh Al-Hâ'ik: edición, traducción y estudio; Thèse de Doctorat, Université Autonome de Madrid; 1996.
 
3 "El renacimiento o toma de conciencia que se viene produciendo durante los últimos años en nuestro país con respecto a esta parte de nuestro legado andalusí,ä" (p.12).
 
4 "intentaré dar una visión de esta música" (ibid.).
 
5 Ce qualificatif désigne notamment le répertoire actuel de l'École de Tlemcen en Algérie.
 
6 Ce qualificatif désigne aussi le répertoire actuel de l'École de Constantine en Algérie.
 
7 L'arbre des modes. Il s'agit d'une représentation sous forme d'un arbre du système des modes marocains.
 
8 Cf. p.32 .
 
9 Cf. p.57 .
 
10 Comparer pp. 32 et 57 .
 
11 Cf. pp.123-125 .
 
12 Comme par exemple les noms de certaines parties constitutives de la nawba.
 
13 Ici je donne un point de vue "emic" puisqu'il provient des musiciens algériens eux-mêmes.
 
14 C'est moi qui souligne.
 
15 Idem.
 
16 Cf. p.125.
 
17 Cf. pp. 44- 47 et 122.
 
18 Poésie arabe classique.
 
19 Cf. p.160.

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